Le couvreur n’est pas un étancheur
Actualités - 21/01/2019Pour les professionnels de la construction le titre de cet article peut apparaître comme une évidence.
Pour les Magistrats de l’Ordre judiciaire cette différence n’est pas si aisée surtout lorsque l’on parle « d’activité déclarée ». En matière d’assurance construction, l’assureur décennal a vocation à servir ses garanties uniquement pour un désordre de nature décennale, c’est-à-dire à la condition que ce désordre porte atteinte à la solidité ou à la destination de l’ouvrage.
En plus des conditions spécifiques aux dommages, les garanties souscrites auprès d’un assureur décennal n’ont vocation à être mobilisées que pour réparer des désordres à caractère décennal qui affectent des travaux de construction réalisés par l’assuré dans son ou ses domaines d’activité qu’il a déclarés à son assureur.
En effet, l’assureur décennal n’a vocation à servir ses garanties que pour les activités déclarées par son assuré.
En d’autre terme, un pisciniste qui aurait souscrit auprès de son assureur décennal uniquement l’activité « piscine » ne pourrait pas demander la mise en œuvre de son assurance décennale pour des désordres affectant la toiture d’un immeuble.
Il est de jurisprudence constante que l’activité non déclarée constitue un cas de non assurance.
En effet, dans un arrêt de principe du 29.04.1997 la première chambre civile de la Cour de Cassation a pu juger que :
« La déclaration d’activité est un élément fondamental qui permet à l’assureur de mesurer exactement le risque qu’il couvre et l’étendue de sa garantie.
« L’équilibre même des contrats comme le principe de leur exécution de bonne foi, ne permets pas d’imposer à l’assureur des garanties qui n’entraient pas dans le champ de ses engagements. » (Cass.1ière civ. 29.04.1997 ; Bull n° 131 ; rapport annuel de la Cour de Cassation 1997 P. 284).
Il existe de nombreuses jurisprudences contradictoires sur l’activité du couvreur et de l’étancheur.
La difficulté provient du fait que de nombreux contrats d’assurance décennale mentionnent que les couvreurs peuvent exercer une activité d’étanchéité, généralement limitée à certains nombres de m², qui n’est que l’accessoire ou le complément de l’activité couverture.
La question qui se pose est de savoir si la réfection totale de l’étanchéité de la toiture terrasse d’un immeuble fait partie de l’activité « couverture – zinguerie » ou s’il s’agit d’un activité particulière et autonome.
Dans un arrêt du 22 novembre 2018, la 3ème Chambre civile de la Cour de Cassation a pu décider en rejetant un pourvoi en cassation formé à l’encontre d’un arrêt de la 3ème Chambre A de la Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE en date du 15.06.2017, que :
« Mais attendu, d’une part, qu’ayant relevé que la société MURANO avait déclaré les activités de travaux de gros-oeuvre, couverture-zinguerie, charpente ossature, bois et platerie, cloison sèche et que le devis de la société MURANO faisait état de la réfection de l’étanchéité de la copropriété, la COUR D’APPEL a exactement retenu que ces travaux, qui concernaient la réfection totale de l’étanchéité de la toiture – terrasse, constituaient une activité particulière et autonome prévue dans la définition des activités « bâtiments » sous la rubrique « étanchéité toiture-
terrasse » consistant en la mise en oeuvre de matériaux bitumeux ou de synthèse, qui ne pouvaient être assimilés à l’activité de couverture – zinguerie. » (Cass 3ème Civ. 22.11.2018 n° de pourvoi 17-23.334).
Même si cette décision peut paraitre évidente pour les professionnels de la construction, elle a le mérite de clarifier la situation puisqu’elle permet de dire que les travaux d’étanchéité toiture – terrasse qui consistent en la mise en oeuvre de matériaux bitumeux ou de synthèse ne peuvent être assimilés à l’activité de couverture – zinguerie.
En conclusion, les constructeurs qui exercent l’activité « charpente – couverture » ne sont pas assurés pour des désordres affectant l’étanchéité d’une toiture – terrasse.
En conséquence, le couvreur qui souhaite exécuter des travaux d’étanchéité d’une toiture -terrasse a l’obligation de déclarer cette activité auprès de son assureur impérativement avant la date d’ouverture du chantier ou de commencement des travaux.